Petit voyage toponymique au quartier Sartoux

Que veut donc dire « Messugues » ? Pourquoi la rue où j’habite s’appelle-t-elle « ruelle des Argeracs » ? Qui donc était Joseph Bermond ? Quels sont les œuvres principales d’Henri Bosco ? Et « Rigaou », est-ce du patois ?

Ce projet réalisé à l’initiative des habitants membres du Conseil de quartier Sartoux (merci !) vous permettra de trouver la réponse à toutes ces questions.

Scannez le QR-code qui se trouve sur chaque plan du quartier : de rues en places, de ruelles en traverses, vous découvrirez que la toponymie du quartier Sartoux est très riche et dessine un paysage provençal bien sympathique !

Bon voyage !

Les rues, ruelles et places du Haut Sartoux
Histoire, signification, illustrations
(Par ordre alphabétique de leur nom)

 

Rue Alphonse Daudet

Romancier, conteur et auteur de théâtre français, Alphonse Daudet est né en 1840 à Nîmes et mort en 1897 à Paris. Son premier roman, Le Petit Chose, Histoire d’un enfant, est, selon les mots-mêmes de l’auteur, une sorte d’autobiographie. Alphonse Daudet reste surtout célèbre pour ses contes aux couleurs de la Provence, rassemblés dans le recueil Les Lettres de mon Moulin, parmi lesquelles figurent notamment La chèvre de Monsieur Seguin, Les trois messes basses, L’élixir du Père Gaucher. Il a aussi écrit Les Contes du Lundi qui sont, eux, inspirés par la guerre franco-allemande de 1870. Alphonse Daudet est également l’auteur de 17 pièces de théâtre.

Ruelle des Arbousiers

Parfois appelé arbre à fraises, l’arbousier est un petit arbre de la famille des Ericacées qui pousse dans le pourtour méditerranéen. On en voit beaucoup dans l’Estérel par exemple. Son fruit, appelé arbouse, mûrit à l’automne ; il est parfaitement sphérique, de la taille d’une grosse cerise, sa peau est recouverte de picots ; selon son degré de maturité il passe du jaune à l’orange, au rouge vermillon puis au rouge sang. Crus, ces fruits sont pleins de vitamine C. Cuits, ils servent à confectionner des marmelades et des liqueurs. Le bois de l’arbousier, au grain très fin, est utilisé en marqueterie et pour fabriquer des objets tournés. La plante est riche en tanins.

Ruelle des Argeracs

Ce nom est une extension du terme provençal « argélièro » désignant une « argilière » et plus largement un terre argileuse. Valbonne possède en effet dans son sous-sol de grandes nappes d’argile rouge ou blanche. Lorsque les gisements d’Antibes nord (les Terriers) et de Vallauris vinrent à tarir vers la fin du 18ème siècle, on développa l’activité d’extraction d’argile sur le territoire de Valbonne : aux Clausonnes, au Sartoux, au Carton, à la Roberte, etc. L’essentiel était vendu aux centres de céramiques de Vallauris, mais il y avait aussi une briqueterie aux Clausonnes et l’on fabriquait également des tuiles et des tommettes avec l’argile valbonnaise. Les derniers puits d’argile sur Sophia Antipolis furent exploités jusqu’après la seconde guerre mondiale.

Ruelle des Asphodèles

Les asphodèles sont des plantes vivaces qui appartiennent à la famille des Liliacées. La plupart d’entre elles poussent autour du bassin méditerranéen et ont une prédilection pour les sols calcaires. Le feuillage des asphodèles se présente sous la forme d’une rosette de feuilles étroites et linéaires, à extrémité pointue. De cette rosette émerge une longue tige nue portant une hampe florale blanc ou blanc crème, dont les pétales et les sépales sont rayés d’une strie centrale rose ou brune. La ruelle des Asphodèles était originellement une place, étendue en ruelle par décision du Conseil Municipal le 12 mai 1981.

Allée de la Bastide

La bastide est probablement l’ancien nom de la ferme Bermond, que l’on appelait autrefois « la bastide de Sartoux ». Propriété des moines de Lérins sous l’Ancien Régime, la bastide servait de bergerie communale, puis fut achetée par la famille Bermond à la fin du XIXe siècle. On y stockait les récoltes d’olives, le foin, les feuilles de mûrier. Le rez-de-cour fut ensuite aménagé en porcherie et les étages servait à la salaison jusqu’en 1976. La Commune rachète le bâtiment et l’aménage en 1990 en Centre de Loisirs.

Rue de la Boyère

Le mot boyère est probablement synonyme de cépée ; il semble en effet désigner une zone débroussaillée dans laquelle on a laissé repartir, depuis les souches, des touffes de branches formant taillis. Par extension, ce mot désigne un terrain couvert de buissons. Voir aussi la rue de Gonelle qui relève du même champ sémantique.

Ruelle des Bruyères

Les bruyères sont des plantes de la famille des Ericacées, qui regroupe plus de 800 espèces. Tantôt petits arbrisseaux, tantôt véritables arbustes, elles ont des fleurs rose-mauve ou blanc cassé. C’est avec la racine des bruyères arborescentes, très compacte mais légère et résistante à la chaleur, qu’on fabrique les pipes en bruyère depuis le milieu du 19ème siècle. La trace de leur présence se retrouve aussi dans le toponyme « brucs », mot d’origine celto-ligure désignant une grande bruyère et, par extension, le maquis (cf. carrefour des Brucs, traverse des Brucs)..

Place des Cines

Les cines sont, en provençal, les fruits de l’aubépine, arbuste épineux de la famille des Rosacées, dont les jolies fleurs blanches ont une odeur vanillée entêtante et dont les fruits sont des baies rouges qui pendent en grappes. La tisane d’aubépine a des vertus apaisantes et l’on peut faire du sirop avec les fruits.

Carrefour et Route des Dolines

Les dolines sont des dépressions, généralement circulaires, dans un sol calcaire karstique. Le calcaire a été dissout par l’eau de pluie, provoquant l’affaissement du sous-sol. Les argiles de décalcification (résidus de la dissolution chimique du calcaire) s’accumulent au fond de ces dolines, retenant l’eau et rendant ces surfaces fertiles et cultivables. Si le fond de la doline continue à se creuser, on peut avoir la formation d’un gouffre ou d’un aven.

Ruelle de l’Ecole

Cette ruelle, en grande partie formée d’escaliers, traverse tout le Haut-Sartoux, du Nord-Ouest au Sud-Est et de son point le plus haut jusqu’au point le plus bas, pour conduire à l’école du Sartoux située dans le vallon entre le Haut-Sartoux et Garbejaïre.

Traverse en Escalier

En provençal, une ruelle en escalier est aussi appelée une calade.

Place de l’Estello

Place de l’Etoile (qui ne saurait rivaliser avec celle de Paris !).

Jardin de la Farigoule

Farigoule est le nom provençal du thym, herbe aromatique de la famille des Lamiacées.

Porte et Calade de la Forêt

Ces passages conduisent à la « forêt » de Sartoux, bosquet situé dans le vallon en contrebas du hameau et zone naturelle protégée.

Rue Frédéric Mistral

Ecrivain et lexicographe provençal de langue d’oc, Frédéric Mistral est né et mort à Maillane dans les Bouches-du-Rhône (1830 – 1914). Son œuvre et sa vie ont eu pour but de défendre et promouvoir la langue d’oc, pour laquelle Frédéric Mistral a inventé une norme de transcription graphique, appelée la graphie mistralienne. Avec six autres poètes provençaux, il a fondé l’association régionaliste Le Félibrige. Il a également rédigé un dictionnaire très complet de la langue d’oc, Le Tresor dóu Felibrige. Son œuvre se compose de chants, de poèmes épiques ou de romans en vers : le plus connu est Mireille, dont Charles Gounod a tiré un opéra. Frédéric Mistral a obtenu le prix Nobel de littérature en 1904.

Rue de Gonelle

Ce nom semble venir d’un mot du bas-latin « gauharia » désignant une zone couverte de taillis. Voir aussi la rue de la Boyère qui relève du même champ sémantique. En 1982, on se rend compte que la petite placette située au bout de la rue de Gonelle, à l’intersection avec la traverse en Escalier et la rue deï Suve n’a pas été baptisée : elle prend le nom de place Mirabeau, oubliée depuis.

Rue deï Grillou

Nom provençal des grillons, petits insectes dont les pattes postérieures sont très développées et adaptées au saut (alors que leurs ailes ne sont pas adaptées au vol) et dont on entend la stridulation tout l’été.

Place Haute

Le Haut-Sartoux, comme son nom l’indique, est une éminence de la vallée de la Bouillide culminant à 199 mètres ; la racine indo-européenne SAR- désignait un promontoire, un sommet. Cette place a, un temps, été nommée « place Mirabeau », le conseil municipal s’étant aperçu que cette place n’avait pas reçu de nom. Mais la désignation descriptive de place haute lui est finalement restée.

Rue Henri Bosco

Romancier français, Henri Bosco est né en 1888 à Avignon et mort en 1976 à Nice. Licencié de lettres et agrégé d’italien, il enseigne le français dans diverses institutions à l’étranger et devient président de l’Alliance Française. Ses romans les plus connus et les plus caractéristiques sont Malicroix, Le Mas Théotime, L’Enfant et la Rivière, Le Récif, ainsi que sa trilogie : L’Âne Culotte, Hyacinthe, Le Jardin d’Hyacinthe. De nombreuses archives sur sa vie et son oeuvre sont conservées à Nice par la bibliothèque universitaire de la Faculté des Lettres d’Université Côte d’Azur, bibliothèque qui porte son nom.

Place Jean Giono

Romancier français, Jean Giono est né en 1895 et mort en 1970 à Manosque, ville qu’il n’a quittée que rarement et à contre-coeur. Nombre de ses romans ont pour cadre la Provence, mais son œuvre, qui dépeint la condition de l’homme dans le monde face aux questions morales et métaphysiques, a une portée universelle. Parmi ses romans les plus connus, on peut citer Colline (le premier paru), Un Roi sans divertissement, Le Hussard sur le toit. En 1953, il reçoit, pour l’ensemble de son œuvre, le prix littéraire du Prince-Pierre-de-Monaco et il est élu l’année suivante au sein de l’académie Goncourt.

Place Joseph Bermond

Joseph Bermond est né et mort à Valbonne (1853 – 1957). Notaire de profession (il a présidé la Chambre des notaires de Grasse), il devient maire de Valbonne en 1900, puis est élu Président du Conseil général des Alpes-Maritimes en 1934. Il a initié de nombreux chantiers importants pour la ville, notamment l’adduction d’eau du Foulon, l’assainissement, l’embellissement et l’éclairage de la ville.

Ruelle des Lavandes

Les lavandes sont des plantes de la famille des Lamiacées qui poussent en grosses touffes et, pour les plus grandes d’entre elles, peuvent former des petits arbrisseaux. Leurs feuilles, fines et allongées, sont vert-gris tandis que leurs fleurs, disposées en épis, sont de couleur mauve ou violette. Dans la plupart des espèces, ces fleurs sont très odorantes et mellifères. Elles sont largement utilisées dans toutes les branches de la parfumerie et pour fabriquer de l’huile essentielle, aux nombreuses vertus. Les lavandes poussent surtout sur les sols calcaires secs et ensoleillés, elles se plaisent donc tout particulièrement en Provence. Sur les hauts plateaux, on trouve la lavande à feuilles étroites (angustifolia), dans l’Estérel on trouve la lavande papillon ou stéchade (stoechas).

Ruelle des Lernes

Ancien nom des vers de terre, notamment des lombrics qui jouent un rôle majeur dans la structuration et l’entretien des propriétés physiques des sols. Animaux fouisseurs, ils contribuent en effet au mélange permanent des couches du sol et à son aération. Mais ils ont aussi un fort impact sur les propriétés chimiques des sols, par exemple sur le cycle du carbone organique. Ils sont indispensables à la bonne qualité des agroécosystèmes : surtout ne les détruisez pas !

Place Marcel Pagnol

Ecrivain et cinéaste français, Marcel Pagnol est né en 1895 à Aubagne et mort en 1974 à Paris. De ses pièces de théâtre, Marius est probablement la plus célèbre. De ses récits en prose, on retient tout particulièrement La Gloire de mon père et Le Château de ma mère tirés de ses souvenirs d’enfance ; mais Jean de Florette et Manon des sources sont désormais d’une actualité brûlante ! Enfin, il a réalisé et produit 24 films, parmi lesquels on peut citer Regain ou La Femme du boulanger, avec des acteurs tels que Raimu, Fernandel ou Pierre Fresnay. Une fondation s’attache à restaurer ce fond filmographique. Marcel Pagnol a été élu à l’Académie Française en 1946.

La Main

Ce banc a été réalisé dans les années 1980 par le sculpteur urbain Henri Marquet. L’artiste a posé son empreinte dans de nombreuses villes du monde, notamment Chicago, Le Havre et plus récemment Paris, ville pour laquelle il a notamment réaménagé une partie des jardins des Halles en 2012. La « Main », qui est en fait un banc public, n’est pas la seule œuvre que l’artiste a offert à la Commune. L’œuvre de Marquet à Valbonne Sophia Antipolis est en fait double. A deux pas de la place Bermond, en prenant la rue Henri Bosco pour entrer dans le cœur du Haut-Sartoux, vous arrivez sur une petite placette où est érigée une fontaine à déversement en gouttière, semblant comme enroulée dans un massif de papyrus et réalisée à partir de carreaux de céramiques vernissés décorés et de carreaux d’argile brute enchevêtrés en calepinage. L’œuvre n’est pas signée. Mais en la regardant attentivement on retrouvera sur la sculpture les empreintes de doigts de l’artiste.

Carrefour des Messugues

Messugue ou massugue, du provençal massugo, désigne le ciste (ou cyste). Dans la région il y a principalement deux variétés de ciste, le ciste cotonneux (fleurs roses et feuilles duveteuses) et le ciste de Montpellier (fleurs blanches et feuilles légèrement collantes). Plus rarement, on voit aussi le ciste blanc à feuilles de sauge. Ce sont des arbrisseaux de la famille des Cistacées qui poussent sur le pourtour du littoral méditerranéen, appréciant tout particulièrement les sols secs et ensoleillés. Leur abondance vient aussi du fait qu’ils ont la propriété de se régénérer facilement et même de se multiplier après les incendies.

Place du Micocoulier

Ainsi dénommée en raison du micocoulier qui pousse en son centre. Dans un premier temps, elle avait été dénommée Place des Orangers, nom que l’on trouve encore sur certains plans du quartier. Le micocoulier est un arbre des zones tempérées à chaudes ; il pousse principalement dans le Midi méditerranéen – son nom est d’ailleurs d’origine provençale. Il fournit un bois apprécié pour les usages nécessitant un bois à la fois souple, solide et durable (cannes, fouet, manches d’outils agricoles, etc.) ; c’est aussi un excellent combustible.

Allée de la Nertière

Lieu planté de myrtes (nerte en provençal). L’odeur suave de ses fleurs (qui s’épanouissent à la fin de l’été), son feuillage toujours vert, ses vertus culinaires et médicales en ont fait une plante très appréciée des peuples méditerranéens dès la plus haute antiquité. Le myrte servait d’encens lors des cérémonies. Au 17ème siècle, les feuilles de myrte étaient récoltées à Valbonne, puis vendues aux tanneurs-corroyeurs de Grasse : en effet, en raison de leur taux de tanin important, elles étaient utilisées pour assouplir et parfumer les cuirs (notamment le fameux cuir vert de Grasse). Le myrte était une ressource extrêmement précieuse pour l’industrie grassoise, si bien qu’en 1699 l’Intendant du Roi en interdit l’exportation de Valbonne vers l’Italie. Dans l’Acte d’Habitation de 1519, les premiers habitants de Valbonne avaient le privilège de pouvoir posséder des moulins à myrte.

Rue deï Peicaou

Un peïcal (pluriel peïcaou) désigne probablement un mont pierreux (cf. aussi la piste du Peïcal dans le parc départemental de la Brague).

Ruelle deï Rigaou

En provençal, les rigaou sont des rouges-gorges.

Rue de la Roberte

Nom de famille des anciens propriétaires des terrains du quartier. C’est le 7 janvier 1983 que l’accès desservant l’antenne forestière de ce quartier prend ce nom par décision du Conseil Municipal.

Ruelle deï Suves

Suves est le nom provençal des chênes-lièges, arbre endémique des forêts valbonnaises dont on peut encore observer de très beaux spécimens à Garbejaïre ou dans le parc de la Brague. L’écorce du chêne-liège (appelée le brusc : cf. Notre-Dame du Brusc) a longtemps été utilisée pour réaliser des ruches, des abris, des toits pour les cabanes et des bouchons pour les bouteilles.

Traverse deï Tourdres

Tourdre est le nom provençal de la grive, petit passereau migrateur, au chant mélodieux, reconnaissable aux taches brun foncé qui constellent sa poitrine beige et son ventre crème. On chasse la grive à sa passe à l’automne et à sa repasse au printemps. Les brochettes de grives étaient particulièrement appréciées des Valbonnais. Les cages à grives étaient courantes dans les cabanons qu’ils possédaient en forêt. La chasse à la glu, traditionnelle sur le pourtour méditerranéen, a été interdite par l’Union européenne en 2009.